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21 mars 1918 : Offensive de Ludendorf, Opération « Michael »

Grâce à la signature du Traité de Brest-Litovsk avec la Russie des Soviets, l’Armée du Kaiser Guillaume II tenant le Front de l’Ouest put compter sur l’apport colossal de 1 million de soldats. Le Grand État-major dirigé alors par les Dioscures Paul von Hindenburg et Erich Ludendorf put alors envisager de lancer une grande offensive – ou plutôt une série d’ offensives – sur le front Français.

– Fidèle à la stratégie de la bataille décisive initiée par Helmut von Moltke dit l’Ancien en 1870, Ludendorf ne veut lancer l’offensive qu’après avoir réuni le maximum de moyens humains et matériels nécessaires.

– Ainsi, 38 nouvelles divisions arrivent sur le Front de l’Ouest entre le littoral des Flandres et le cours de la Marne.
La première phase du plan général de Ludendorf est stratégiquement simple : reprendre la guerre de mouvement et enfoncer à l’aide de 1 300 000 hommes, les lignes françaises et britanniques entre les cours supérieurs de la Scarpe et de l’Oise pour prendre Amiens, important nœud de communication allié, dans l’espoir d’atteindre les côtés de la Manche pour couper les lignes alliées en deux. Les phases suivantes visent à forcer les cours de la Lys (Flandres, secteur d’Ypres) et de la Marne (Champagne).

– Mais c’est sur le plan technique, sinon tactique, que le plan de Ludendorf s’avère plus novateur. Il réside notamment dans l’utilisation des Stosstruppen (ou Sturmtruppen), des unités d’infanterie spécialisées dans l’infiltration en profondeur lignes adverses grâce à de nouvelles techniques de combat : utilisation de lance-flammes et d’armes collectives (mortiers, fusils-mitrailleurs, Minnenwerfer…). L’emploi de telles unités datent du début de la guerre mais il a été perfectionné par le général Oskar von Hutier contre les Russes à Riga en 1917. En outre, une impressionnante artillerie est mise en lice, ainsi que des avions des jeunes (Luftstreitkräfte), qui ne sont pas encore pleinement différenciées de l’Armée de Terre. En revanche, contrairement à ses adversaires, Ludendorf a négligé le rôles des chars. Il en dispose de très peu (tandis que la France en a déjà produit plus de 3 000 et que la Grande-Bretagne en dispose elle aussi d’un bon nombre), soit 20 Sturmpanzerwagen A7V, un engin pataud et lent, ne roulant qu’à 16 km/h sur route et 4-8 en tout terrain (contre

Erich Ludendorff

Erich Ludendorff

– Pour l’Opération Michael, Ludendorf met en lices les III., XVII. et XVIII. Armeen commandées respectivement par Georg von der Marwitz, Otto von Below et von Hutier. Elles comptent 37 Divisions qui sont de la première vague d’assaut, ainsi que 27 Divisions de Réserve.

– En face, les commandements britanniques et français s’attendent à l’imminence d’une offensive allemande. La IIIrd Army du General Julian Byng (6 Divisions) se tient en alerte entre Croisilles et La Vacquerie (QG à Albert), pendant que la Vth Army de Hubert Gough (QG à Nesle) tient la ligne entre La Vacquerie et La Fère (vallée de l’Oise) avec 10 divisions. Gough croit être à l’abri derrière les marais de l’Oise mais ceux-ci ont été asséchés.

– Ainsi, le 21 mars Ludendorf déclenche l’Opération Michael du nom du Saint Patron de l’Armée du Kaiser. Des tonnes d’obus explosifs et toxiques s’abattent sur les positions britanniques en Picardie. Puis, les Stosstruppen des IIIXVII et XVIII. Armeen s’élancent contre les tranchées adverses. Les états-majors alliés – qui n’ont toujours pas formé de commandement unique – ne s’attendent absolument pas à une offensive d’une telle ampleur. Il faudra que des bataillons et des régiments improvisent des défenses pour retarder l’Armée allemande. Du côté de la IIIrd Army de Byng, les divisions tiennent bon et reculent pied-à-pied. En revanche, les 10 divisions de Gough voient fondre sur elles la masse des XVII et XVIII Armeen. Les Britanniques connaissent de lourdes de pertes. Tout en devant reculer ses forces vers Amiens, Gough fait ce qu’il peut pour maintenir la liaison entre Byng sur son aile nord et surtout, avec la VIe Armée française sur son aile gauche.

GasMask7– Au Grand Quartier Général français, la situation n’a pas échappé à l’œil de Pétain qui décide immédiatement de rassembler des forces pour maintenir la charnière entre Français et Britanniques soudées. Ainsi, il ordonne au Général Émile Fayolle de se tenir prêt à rassembler ses forces du Groupement d’Armées de Réserve (GAR) et au Général Georges Humbert de s’apprêter à faire manœuvrer sa IIIe Armée vers la Fère. Pendant ce temps, le Ve Corps du Général Pellé commence à embarquer ses hommes et ses canons sur camions. C’est la 125e Division d’Infanterie du Général Diebold qui arrive à Quierzy durant la journée. En même temps, Pétain ordonne au Général Eugène Debeney de faire embarquer toute sa Ire Armée, alors maintenue en réserve en Champagne en vue d’être transférée en Picardie.

– Enfin, comme le dit Jean Lopez, les Alliés ont un avantage sur Ludendorf ; la logistique. En effet, comprenant qu’il faut au mieux utiliser l’espace, le Grand Quartier Général Français a doté les Divisions et les Corps d’Armées d’unités de transport par camion, donnant ainsi à l’Armée une motorisation inégalée. En outre, des routes ont été aménagées par les territoriaux derrière les lignes du front pour permettre un meilleur acheminement.


Lire :

– KEEGAN John, La Première Guerre mondiale, Perrin, Paris
– LOPEZ Jean (Dir.) : Guerre et Histoire N°5, L’Armée française à son Zénith, 2012
La bataille de l’Empereur. 21 – 31 mars 1918, http://www.chtimiste.com
– JÜNGER Ernst, Orage d’Acier