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Chroniques de la Bataille de Normandie – 7/ L’échec britannique devant Caen

Nous avons vu les difficultés qu’éprouvent les Britanniques et les Canadiens à s’emparer de Caen à la droite (ouest) et centre de leur dispositif. Voyons à présent les difficultés rencontrées sur leur flanc gauche (est).
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– Plusieurs raisons expliquent l’échec des Britanniques à s’emparer de Caen dès le soir du 6 juin. De l’aveu même du Major.General Thomas Rennie, sa 3rd Infantry Division avait fourni un travail important le Jour-J même. Ainsi, ses trois brigades avaient pour charge de réduire les positions allemandes à Sword Beach mais aussi de foncer sur Caen (185th Brigade). Mais les embouteillages provoqués sur la plage en raison du retard pris par les équipes du Génie et de la 79th Armoured Division à ouvrir des passages dans les champs de mines, ont retardé le déploiement de l’ensemble de la division. Pis encore, la contre-attaque, certes improvisée, menée par des éléments de la 21. PzD ont convaincu Crocker que les forces allemandes étaient plus importantes que prévu autour de Caen. Crocker a donc ordonné à Rennie d’arrêter la progression de sa division afin de regrouper ses forces pour lancer un assaut. Autre erreur, au lieu de lancer la 9th Infantry Brigade (Cunningham) plus au sud avec l’appui de l’East Reading Yeomanry, Crocker préfère la déplacer plus à l’est afin de venir en aide aux parachutistes de la 6th Airborne accrochée à la rive droite de l’Orne.

Insigne de la 3rd Infantry Division

Insigne de la 3rd Infantry Division

Major.General Thomas Gordon Rennie

Major.General Thomas Gordon Rennie

– Du côté allemand, alors que Feuchtinger arrive de Paris pour reprendre la tête de sa division, menés par von Berlichingen (chef d’état-major*) von Oppeln-Bronikowski et le Major Hans von Luck, patron du Panzer-Grenadier-Regiment 125, les éléménts de la 21. PzD s’établissent solidement à la périphérie de Caen et sur la rive gauche de l’Orne. Le II/PzGren-Regt. 192 de l’Hauptmann Werner Rätzer tient solidement Lébisey et Bieville dès le 6 juin face au  2nd Bn. King’s Own Shropshire Light Infantry (KSLI) du Lt.Col. Maurice (185thBrigade). Il faut ajouter à cela que la 8th Brigade n’est pas entièrement opérationnelle car elle a dû passer tout le reste de la journée du 6 à réduire la position « Hillman » pendant toute la journée du 6.

Major Hans von Luck

Major Hans von Luck

– Crocker et Rennie tentent de reprendre l’offensive vers Caen dès le 7 juin. Déjà, sur ordre de son supérieur, Rennie replace la 9th Brigade de Cunningham (2nd Lincoln, 1st King’s Own Scottish Borderers et 2nd Royal Ulster Rifles) sur son secteur d’origine à l’ouest de Bénouville. Ainsi, la 185thBrigade de Pearce Smith, avec le 2nd Bn. Royal Warwickshire (Lt.Col. H.O. Herdon), appuyé par le tir conjugué des pièces de 25 livres des 7th  et 33rd Field Regiments, ainsi que par les canons lourds du HMS « Warspite » tente de s’emparer de Lébisey, bien tennu par le Panzergrenadier-Regiment 125 d’Hans von Luck mais c’est un échec.

Insigne du Royal Ulster Rifles Regiment

Insigne du Royal Ulster Rifles Regiment

– Le 8 juin, appuyée par le 1st Bn. East Riding Yeomanry (27th Armoured Brigade) et les pièces légères du HMS « Danae », le 2nd Bn. Royal Ulster Rifles du Lt.Col. Ian Harris tente de s’emparer de Cambes afin d’accrocher les faubourgs de Caen. Mais face aux hommes du Panzergrenadier-Regiment 192 de l’Oberst Josef Rauch bien retranchés, les nord-irlandais doivent mener un dur combat avec des pertes. Ils parviennent à semparer du bourg mais ils en ont chassés par l’arrivée inopinée d’éléments de la 12. SS-PzD « Hitlerjugend ». Le 8, le 2nd Royal Ulster Rifles lance un nouvel assaut qui s’avère fructueux mais il a perdu en trois jours un peu moins de 200 hommes sur 850.

– Montgomery et Crocker tentent alors de prendre Caen par l’est, en s’assurant le contrôle du bourg de Cagny par une rocade d’environ 8 km. Cette mission est confiée à la 51st Highland Infantry Division du Major.General Bullen-Smith (unité favorite de Montgomery puisqu’elle mena l’un des principaux assauts d’el-Alamein), avec l’appui de la 4th Armoured Brigade. Entièrement mise à terre le 7, la 51st Highland vient relever les parachutistes de la 6th Airborne à l’est de l’Orne qui avaient perdu Bréville et avaient été malmenés par les éléments de la 21. PzD au sud de leur dispositif. Dès le 9, les Ecossais sont engagés pour refouler une contre-attaque de Panzergrenadiere et de chars du Kampgruppe « von Luck ». Le 11 juin, la 153rd Infantry Brigade (51st HD) lance son assaut contre Cagny avec l’appui de chars de la 4th Arm.Brig pour se faire impitoyablement bloquer par un tir nourri de mortiers et de mitrailleuses. Son 5th Bn. Black Watch, doit même céder des prisonniers aux Panzergrenadiere, perdant 200 hommes dans l’affaire. Et le reste de la 153rd Brigade ne fait pas mieux. La piteuse entrée en scène des Highlanders fait encore échouer plan de Montgomery.

– Pendant ce temps, le Major.General Richard Gale ordonne au 12th Parachute Battalion du Lt.Col. Anthony Johnson de reprendre Bréville très bien défendu. Appuyés par des blindés, les parachutistes britanniques réussissent à reprendre le bourg après un violent combat contre les Panzergrenadiere.

Lieutenant-General John Crocker, commandant du Ist British Corps

Lieutenant-General John Crocker, commandant du Ist British Corps

– Pour s’emparer de Caen, Montgomery échafaude un plan aussi audacieux que risqué ; tout simplement larguer dans les environs d’Evrecy, donc sur les arrières allemands, la 1st Airborne Division du Major.General Robert Urquhart restée en réserve en Grande-Bretagne. Mais au cours d’un entretien houleux au château de Creully entre Montgomery et Trafford Leigh-Mallory (commandant des forces aériennes expéditionnaires alliées), le général de la RAF fait catégoriquement comprendre à son collègue qu’il est absolument hors de question faire croiser des Dakotas et des planeurs juste au-dessus de la FlaK allemande. Montgomery doit alors s’incliner mais traite Leigh-Mallory de « dégonflé » aussitôt que ce dernier eut quitté les lieux, selon ce qu’a pu rapporter un témoin a posteriori.

– L’échec à prendre Caen par l’est conduit alors Montgomery à placer temporairement l’aile droite du Ist British Army Corps de Crocker dans un rôle de surveillance de l’Orne et des abords de Caen et à effectuer un redéploiement sur son flanc ouest dans le secteur du XXXth Corps de Bucknall et du VIIIth British Army Corps de Richard O’Connor qui vient d’être mis à terre.

[Suite]

* Descendant du reître du XVIe siècle qui donne aussi son nom à la 17. SS-Panzergrenadier-Division.

(1) : In, BEEVOR A.: D-Day, Calmann-Lévy