Né le 14 septembre 1894 à Bauzun (Béarn), Pierre Marie Théas entre d’abord au Séminaire de Bayonne, avant d’être pris par la Grande Guerre. Il sert au 13e Régiment d’Infanterie de Ligne, puis au 173e RI durant tout le conflit dont il sort décoré et cité.
Après avoir achevé ses études théologiques, il estordonné prêtre le 26 septembre 1920, avant d’intégrer le Séminaire Français de Rome où il réside pendant trois ans. Il est ensuite vicaire à Pau, puis professeur de Théologie Morale au Séminaire de Bayonne. En 1940, après une courte mobilisation sur les Pyrénées, il devient Évêque de Montauban.
D’abord très attaché à la figure du Maréchal Pétain et aux valeurs de la Révolution Nationale, il reçoit le vainqueur de Verdun dans la liesse populaire à Montauban. Mais en même temps, il rend hommage au philosophe Henri Bergson (né juif) et des bruits courent qu’il aurait même donné l’Extrême-Onction au très anticlérical Manuel Azana, ancien Président de la République Espagnole, réfugié à Montauban.
En 1941, Monseigneur Théas bascule plus ouvertement dans l’opposition et interdit à ses prêtres d’intégrer la Légion des Combattants et au Service d’Ordre Légionnaire (SOL). Le 23 août 1942, il fait lire une première lettre de l’Archevêque de Toulouse, le Cardinal Jules-Géraud Saliège, Et clamor Jerusalem ascendit. Le 30 août, après que les Autorités de Vichy eurent déclenché une première rafle dans le diocèse l’Évêque de Montauban fait lire la lettre pastorale suivante (diffusée aux paroisses grâce à sa secrétaire, Marie-Rose Gineste) :
« Des scènes douloureuses et parfois horribles se déroulent en France, sans que la France en soit responsable.
À Paris, par dizaines de milliers, des Juifs ont été traités avec la plus barbare sauvagerie. Et voici que dans nos régions on assiste à un spectacle navrant : des familles sont disloquées ; des hommes et des femmes sont traités comme un vil troupeau et envoyés vers une destination inconnue, avec la perspective des plus graves dangers.
Je fais entendre la protestation indignée de la conscience chrétienne et je proclame que tous les hommes, aryens ou non aryens, sont frères parce que créés par le même Dieu ; que les hommes, quelle que soit leur race ou leur religion, ont droit au respect des individus et des États.
Or les mesures antisémites actuelles sont un mépris de la dignité humaine, une violation des droits les plus sacrés de la personne et de la famille.
Que Dieu console et fortifie ceux qui sont iniquement persécutés ! Qu’il accorde au monde la paix véritable et durable, fondée sur la justice et la charité ! »
Le courageux évêque de Montauban – couvert par le Préfet du Tarn-et-Garonne François Martin – protège les religieux de son diocèse qui aident les pourchassés et va jusqu’à signer lui-même de faux certificats de baptême.
En 1943, il s’élève contre le Service du Travail Obligatoire (STO), ce qui achève de braquer les Autorités de Vichy contre le lui. Et en mai 1944, il rédige une lettre au commandant de la Kommandantur de Montauban dans laquelle il condamne les exactions commises par des hommes de la 2.SS-Panzer-Division ‘Das Reich’ à Montpezat-en-Quercy.
Arrêté par les Allemands en juin 1944, il est incarcéré au Frontstalag 122 de Compiègne avant d’être libéré par les Américains le 25 août. Il fait un retour triomphal dans son diocèse le 9 septembre mais s’oppose à une épuration sanglante.
Après la Guerre, Monseigneur Théas participe à la fondation du mouvement Pax Christi et plaide pour une réconciliation entre la France et l’Allemagne. Fidèle à la Doctrine Sociale de l’Église, il fait des démarches en faveur des plus défavorisés. Mais il s’oppose à l’idéologie communiste qu’il considère comme un « un recul de l’Histoire ». Il condamnera notamment l’intervention armée des Soviétiques à Budapest.
En 1947, il quitte son diocèse de Montauban pour celui de Tarbes et Lourdes.
Huit après sa mort, en 1985, l’État d’Israël lui décerne le Titre de « Juste Parmi les Nations ». Sa lettre pastorale est aujourd’hui conservée au mémorial de Yad Vashem.